SCHISME D’OCCIDENT (GRAND)

SCHISME D’OCCIDENT (GRAND)
SCHISME D’OCCIDENT (GRAND)

SCHISME D’OCCIDENT GRAND

C’est en 1378 que surgit dans l’histoire de l’Église ce qu’on appelle le Grand Schisme d’Occident, qui dura près de quarante ans et qui fut consécutif à une double élection pontificale. En 1377, en effet, le pape Grégoire XI avait quitté Avignon, où la papauté était établie depuis les années 1310, et s’était réinstallé à Rome. À sa mort, survenue l’année suivante, on pouvait croire qu’un Français allait de nouveau lui succéder puisque, sur seize cardinaux, onze étaient originaires de France. Cependant, sous la pression des Romains, qui exigeaient la désignation d’un pontife appartenant à leur ville, ou pour le moins italien, et devant des démonstrations assez violentes de leur part, le conclave élut l’archevêque de Naples, Barthélemy Prignano, qui prit le nom d’Urbain VI et fut couronné quelques jours plus tard en présence de tous les cardinaux; mais il se montra maladroit et cassant avec eux. Il en résulta un très grave mécontentement, surtout parmi les Français, puis une rupture, qui conduisit à la dénonciation de l’élection (accomplie, dit-on, sous la pression populaire, donc non valable) et à la désignation d’un autre pape, le cardinal Robert de Genève, qui devint Clément VII. Aussitôt, les deux papes cherchèrent à se faire reconnaître par les princes et les clergés. La division politique de l’Europe (guerre de Cent Ans notamment) poussa les monarques à ne pas adhérer à la même obédience. En quelques mois, le monde catholique se divisa en deux camps ennemis, les clémentins et les urbanistes. Clément VII, fixé en Avignon, eut pour lui la France, le royaume de Naples, le duché de Savoie, les royaumes ibériques, la Sicile, l’Écosse et quelques principautés du sud et de l’ouest de l’Allemagne. Urbain VI, à Rome, fut reconnu par l’Empire, l’Angleterre, la Hongrie, les royaumes scandinaves, les pays de l’Italie du Nord et d’Italie centrale, ainsi que ceux d’Allemagne septentrionale.

Loin de tenter un rapprochement, chacun des deux adversaires résolut d’éliminer son concurrent par la force en s’appuyant sur les princes de son obédience. Ce fut la «voie de fait», qui coûta cher à l’un et à l’autre, et fut marquée avant tout par les initiatives militaires de la France en Italie (Louis d’Anjou) et du royaume de Naples afin de reprendre Rome pour Clément VII. Elle n’aboutit à aucun résultat positif et aggrava les troubles provoqués par le schisme, qui non seulement scindait la chrétienté en tant qu’entité politique, mais opposait souvent les âmes les plus ardentes (Catherine de Sienne est urbaniste, Vincent Ferrier clémentin) et, de toute façon, portait durablement atteinte au prestige de la papauté.

En 1389, Urbain VI étant décédé, on espéra une réconciliation. Les cardinaux s’y refusèrent et lui donnèrent un remplaçant, Boniface IX, auquel succédèrent Innocent VII en 1404, puis Grégoire XII en 1406. De leur côté, les avignonnais élurent Benoît XIII en 1394. Cet entêtement commun suscita la réprobation des meilleurs et l’abandon de la voie de fait. Les maîtres de l’université de Paris (d’abord Henri de Langenstein et Conrad de Gelnhausen, ensuite Nicolas de Clamanges, Pierre d’Ailly, Jean Gerson) proposèrent très tôt le recours au jugement du concile œcuménique. Cependant, avant d’en venir là, d’autres solutions furent essayées. La soustraction d’obédience, décidée en 1398 pour des raisons diverses par le roi de France, qui ne reconnut plus aucun pape, aurait pû entraîner les autres puissances à agir de même et forcer les deux pontifes à l’abdication. Elle échoua, comme échouèrent les tentatives de compromis direct entre les deux adversaires.

En 1408, la plupart des cardinaux romains se séparèrent de Grégoire XII, tandis que la France abandonnait à nouveau Benoît XIII. Les deux collèges cardinalices entrèrent alors en relations; il en résulta la réunion d’un concile à Pise (mars-juill. 1409) qui rassembla de nombreux participants; il proclama la déposition des deux papes et élut le nouveau pontife, Alexandre V, déclaré seul légitime. Malheureusement, certaines puissances refusèrent d’abandonner l’obédience antérieurement choisie et, bien que le pape désigné à Pise eût pour lui la France, l’Angleterre et la plupart des évêques allemands, le schisme subsista et devint tricéphale.

En 1410, Jean XXIII, un personnage ambitieux et violent, plus politicien que pasteur, succéda à Alexandre V décédé. Il se fit vite de nombreux opposants. Cela permit à l’empereur Sigismond de convoquer un nouveau concile qui se réunit à Constance de 1414 à 1418 et qui s’occupa aussi de l’affaire hussite et de la réforme de l’Église. Jean XXIII, qui espérait être confirmé par cette assemblée, dut déchanter, tenta de s’enfuir, fut rattrapé et arrêté, puis déposé pour «simonie et façon de vivre scandaleuse». Grégoire XII accepta d’abdiquer. Quant à Benoît XIII, il refusa de se soumettre et fut lui aussi déposé, mais il se maintint jusqu’à sa mort dans la forteresse de Pezníscola (Baléares) et eut même des successeurs.

Le 11 novembre 1417, le collège des cardinaux, renforcé par six députés de chaque nation du concile (France, Angleterre, Allemagne, Italie, Espagne), élut à la quasi-unanimité le cardinal Odon Colonna, qui prit le nom de Martin V. Le schisme était terminé, l’unité rétablie, mais les troubles demeuraient. Tandis que la théorie conciliaire, proclamée à Pise et à Constance, selon laquelle, dans l’Église, l’autorité suprême appartient au concile battait en brèche la traditionnelle doctrine de la souveraineté du pape, et que, dans divers pays, les rois se mettaient à envisager avec l’épiscopat une organisation nationale de la vie ecclésiastique (ainsi le gallicanisme en France), une réforme des mœurs et des mentalités se faisait de plus en plus urgente.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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